Des clubs canins qui enseignent la maltraitance : ça existe encore.

Jusqu’où iriez-vous pour avoir un chien obéissant ? Certains n’auront pas besoin d’aller plus loin que des encouragements, des récompenses, et un étroit lien de confiance et de coopération avec leur chien. D’autres, et ils sont nombreux, commenceront par des coups de collier. Si ça ne marche pas, ils utiliseront un collier étrangleur. En cas de grosse bêtise, ils n’hésitent pas à plaquer leur chien au sol. Le menacer avec un bâton. L’électrocuter avec son collier. Le suspendre par la peau du cou. Soyons clairs. Il ne s’agit pas ici de méthode d’éducation. C’est de la maltraitance. Et cette maltraitance est tolérée à cause d'une poignée de dresseurs qui prônent encore fièrement ces méthodes de dressage barbares. Méfiez-vous des éducateurs « traditionnels » Les dernières découvertes sur le comportement canin ont complètement remis en question les principes traditionnels de l’éducation canine. Les meilleurs professionnels se sont adaptés à ces nouvelles découvertes. Et bien d’autres, ancrés dans leurs méthodes archaïques, ont refusé d’évoluer. Ils se sont enfoncés dans la barbarie, dans la coercition, et dans la soumission du chien. Pire encore : ils continuent de défendre leurs méthodes violentes, en l’enseignant aux propriétaires de chien mal informés. En voici quelques exemples en vidéo. Attention, car ces images peuvent être choquantes.

Malheureusement, ces actes de maltraitance sont loin d’être isolés. Ils sont même communs dans les clubs canins traditionnels. A leur tête, des individus qui profitent de leur statut « d’éducateur canin » pour vendre leurs méthodes comme parole d’évangile. Voici la barbarie dont j’ai moi-même pu témoigner en club canin. Comme beaucoup d’entre nous, à l’adoption de mon premier chien, j’étais perdu. Je n’avais qu’une vague idée de comment lui apprendre à être propre ; à marcher en laisse ; à avoir du rappel… Croyant bien faire, j’ai intégré un club canin – qui pourtant était bien référencé. Grave erreur. « L’éducateur canin » (je mets des guillemets, car son incompétence ferait honte à cette belle profession) était un arnaqueur. Non seulement, il était violent dans ses mots, ses gestes, ses attitudes ; mais surtout, il n’a été d’aucune aide à tous les participants de son cours collectif. Voilà quelques exemples de ses ‘méthodes’ complètement archaïques dont j’ai pu témoigner. Un vieux labrador chocolat, sorti de chenil, avait pour seul défaut une gourmandise à toute épreuve. Pour y ‘remédier’, le dresseur lui présente une saucisse, pendant que son maître lui ordonne simplement : « pas toucher ». Évidemment, le chien qui n’a pas encore appris cette injonction se jette sur la friandise. Réponse violente et immédiate : l’éducateur lui hurle dessus de toutes ses forces. On ne peut le nier, les résultats sont au rendez-vous : le Labrador, terrifié, refuse de s’alimenter pendant les 24 heures qui suivent. Un jeune Cocker chiot issu d’un élevage familial participe également au cours. Son maître souhaite lui apprendre les bases de l’éducation. Le dresseur s’y donne à cœur joie, à violents coups de collier étrangleur. Il éjecte le Cocker un mètre en arrière dans un jappement de douleur. Et voilà, messieurs-dames, comment un éducateur traditionnel apprend la marche au pied à un chiot. À côté, une Malinoise. Elle a peur de son propre maître depuis sa dernière fugue. Cela lui a coûté une rouste si disproportionnée qu’elle n’ose plus s’approcher de son propriétaire quand il la rappelle. Solution appliquée par notre éducateur : lui jeter une bouteille remplie de billes. Le bruit des billes la terrorise, et ne trouvant aucune échappatoire, elle se réfugie derrière son maître. Et c’est ainsi qu’on apprend le rappel à un chien peureux. Qu’en est-il du lien de confiance brisé entre le chien et son maître ? Ce n’est clairement pas la priorité de notre éducateur. J’étais tétanisé et tellement mal à l’aise… J’ai quitté le cours, et ne suis jamais revenu. Encore aujourd’hui, je regrette de ne pas avoir levé la voix. Car qui étais-je, pour m’opposer à un éducateur canin certifié ? Conscient de mon manque d’expérience en la matière, je n’ai pas osé m’opposer à cette barbarie. Je n’avais aucune méthode alternative à proposer. Je sentais juste, au fond de moi-même, que je ne pourrais jamais adhérer à ce type de « dressage ». Par manque de connaissance, de confiance, je n’ai donc jamais osé défier le dresseur. Aujourd’hui, je le regrette amèrement. Car tel est le problème dans ces clubs canins aujourd’hui. En réalité, n’importe qui peut obtenir une ‘certification’ d’éducateur canin. C’est un statut qui n’est pas reconnu par l’État. Donc pas besoin de formation pour prêcher telle ou telle méthode d’éducation. En d’autres termes : il n’est pas impossible que vous soyez vous-même plus compétent que votre éducateur canin. N’en doutez pas : les plus incompétents profiteront de votre manque de connaissances. C’est ainsi qu’ils font perdurer la doctrine coercitive. C’est à cause d’eux qu’aujourd’hui, on croit encore devoir ‘soumettre’ son chien. Se comporter comme le ‘mâle alpha’. Faire respecter une prétendue ‘hiérarchie’. Mais ces méthodes ne sont pas sans conséquence. Les troubles physiques et psychologiques irréversibles de l’éducation violente La liste est longue. Par où commencer ? Par la détérioration de la glande thyroïde suite aux coups de collier étrangleur ? Le stress continu que subit le chien ? La perte de motivation totale ? La crainte éprouvée par le chien vis-à-vis de son propre maître ? Le crescendo de la violence pour que les punitions restent efficaces ? On rêve tous d'un chien bien éduqué. Mais à quel prix ? Êtes-vous prêt à rompre votre rapport de complicité à grands coups de collier ? De hurlements ? De manipulation par la peur ? Et dans l’unique but que votre ami ne soit pas trop gourmand, pas trop fugueur, et pas trop agité ? Sauvez votre chien de la détresse acquise Les dresseurs barbares justifient tous ces méthodes archaïques de la même façon : « oui, mais ça marche ! ». Et en effet. Donnez systématiquement un coup de collier étrangleur à un chien qui tire en laisse, et il finira par marcher au pied. Plaquez violemment votre chiot au sol quand il aboie, et il finira (peut-être) par se taire. Est-ce ainsi qu’on mesure une éducation réussie ? Certainement pas. Un chien dont l’éducation est réussie est coopératif – pas soumis. Il est motivé – pas terrifié. En fait, l’obéissance de ces pauvres chiens repose sur un mécanisme bien connu : la détresse acquise. Le concept de la détresse acquise fut mis à jour par le psychologue Martin Seligman, dans les années 60 aux États-Unis. À l’aide de différentes expériences en laboratoire, il démontre la chose suivante : « Un individu (humain ou animal), placé de façon répétée dans une situation stressante, nuisible, et sur laquelle il n’exerce aucun contrôle, finit par tomber dans un état de détresse cliniquement semblable à la dépression. »¹. Par exemple, un rat qui subit constamment des décharges électriques, sans pouvoir lutter ou fuir, conclut que toute action de rébellion est inefficace. Il capitule, et se résigne passivement à son sort. Il subit les chocs sans rien dire, sans bouger. Cela vous semble cruel ? Et bien c’est exactement ce qu’il se passe pour les chiens qui subissent constamment les représailles violentes de leurs maîtres. Pourtant, il existe une méthode d’éducation à la fois plus respectueuse ET plus efficace Les 20 dernières années ont été riches en découvertes sur le comportement canin. Les études les plus récentes sont catégoriques² : l’éducation positive et bienveillante est plus efficace que le dressage traditionnel. Une étude menée à l’université de Bristol (RU) en 2004 a notamment prouvé que les chiens éduqués au renforcement positif sont plus aptes à suivre différents exercices d’obéissance. Surtout, elle révèle que les chiens dressés à la punition sont plus souvent sujets aux problèmes comportementaux – agressivité, aboiements, chevauchements, anxiété de séparation… C’est à partir de ces découvertes qu’un nouveau courant de l’éducation canine est né. Ce courant porte plusieurs noms. Éducation positive. Bienveillante. Respectueuse. Le principe : vous n’avez pas besoin d’entrer en conflit avec votre chien pour vous faire obéir. Votre chien est motivé ; coopératif ; sans jamais devoir lever la main, ni même la voix. Vous tissez un lien de confiance avec votre compagnon, grâce auquel il comprend ce que vous attendez de lui. Il se plait à suivre vos instructions. Tout le monde est gagnant. La preuve dans la vidéo qui suit : Mettre fin aux aboiements… sans lever la voix ! Commençons tout de suite avec un exemple concret, représentatif de l’efficacité de la méthode positive. Cet exemple, c’est Nacho. Nacho est un chihuahua que Sara, une des comportementalistes canines avec qui je travaille, a eu l’occasion d’éduquer. Nacho a horreur du bruit de la sonnette. À chaque fois qu’elle tinte, il entame une symphonie d’aboiements stridents. Sa maîtresse a beau le gronder, impossible pour Nacho de se calmer. Plutôt que de punir Nacho, Sara essaye d’abord de comprendre la cause des aboiements. Elle réalise que l’arrivée d’un étranger est source de stress pour le chihuahua. Et Nacho associe le bruit de la sonnette à cette arrivée. Sara décide donc de dissocier le bruit de la sonnette de l’arrivée d’un invité. Avec la maîtresse de Nacho, elles font donc sonner la porte régulièrement, et de manière aléatoire. À chaque fois que cela se produit, elles donnent un morceau de saucisse à Nacho. Au bout de 5 tintements, le tour est joué : Nacho n’aboie plus. Au contraire : à chaque coup de sonnette, il court vers sa maîtresse pour avoir une friandise ! Voici la preuve dans cette vidéo réalisée par Sara :

Qu’en pensez-vous ? Avez-vous vous aussi des témoignages à apporter sur des choses qui vous ont choqué en éducation canine ? Des méthodes bienveillantes qui ont fonctionné ? Je lirai avec grand plaisir votre partage d’expérience en commentaire.

Claude Lefevre

¹ https://www.demaindemaitre.ca/chien-impuissance-detresse-acquise/ ² http://dogscouts.org/base/tonto-site/uploads/2014/10/620_art_training_methods.pdf

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