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Interview du Vétérinaire Comportementaliste Stephan Gronostay : Casser le mythe de la hiérarchie homme-chien

Publié le 08 Octobre 2019
Interview du Vétérinaire Comportementaliste Stephan Gronostay : Casser le mythe de la hiérarchie homme-chien
L’équipe Chien Vie et Santé a eu le plaisir d’interviewer le Dr vétérinaire comportementaliste Stephan Gronostay. Diplômé en médecine vétérinaire de l’université Justus-Liebig Giessen (Allemagne), le Dr Gronostay a aussi obtenu le Certificat d’Etudes Vétérinaires Approfondies « Médecine du Comportement des Animaux Domestiques » à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort en 2015. Il exerce en tant que vétérinaire comportementaliste à domicile dans les départements du Nord et Pas-de-Calais, et fait aujourd’hui partie des meilleurs experts européens sur le comportement canin. Pour voir son site, cliquez ici. Dans cet interview, il nous explique scientifiquement en quoi l’idée de hiérarchie entre un maître et son chien n’a pas lieu d’exister.   D’où vient cette idée d’une hiérarchie entre chiens et maîtres ? Ce sont d’anciennes connaissances. Elles sont basées sur l’observation de loups en captivité. Les loups, uniquement en captivité, mettent en place une hiérarchie linéaire basée sur l’agression. C’est particulièrement le cas avec les groupes de loups non apparentés. Les chercheurs en ont vite conclu : si ça se passe comme ça entre les loups > ça se passe aussi comme ça entre les chiens > et pourquoi pas aussi entre les hommes et les chiens. Mais c’est faux. Pourquoi ? Y a-t-il une hiérarchie parmi une meute de loups sauvages ? À l’état sauvage, les loups ont bien sûr une organisation sociale. Mais elle se joue entre les parents et les descendants. C’est une dominance naturelle qui n’est pas du tout basée sur l’agression. Au contraire, leur vie ensemble repose sur l’affection et sur l’apaisement. Puis, quand les jeunes loups arrivent à l’adolescence, dès les premières disputes avec les adultes, ils quittent la meute. Cette hiérarchie fonctionne-t-elle aussi chez les chiens ? Les chiens ne sont pas des loups. Les chercheurs ont aussi fait des observations sur des chiens errants. Et dans la plupart des groupes sociaux, il n’y a même pas de hiérarchie stable. Il y a des conflits, bien sûr, mais ils sont individuels. C’est-à-dire qu’il n’y a pas de hiérarchie linéaire qui va du plus dominant au plus soumis. Au contraire, ce sont des relations individuelles entre les différents chiens dans le groupe. Le chien A a une relation particulière avec chien B en ce qui concerne certaines ressources, et une relation toute différente pour d’autres ressources. C’est-à-dire qu’un chien A peut être vainqueur face au chien B pour se départager un morceau de viande, mais ce même chien A laissera sans broncher la femelle de la meute au chien B C’est ça. Le chien A peut être le vainqueur pour certaines ressources, mais en laisser d’autres au chien B dans un autre contexte. En fonction de la ressource qui est en jeu, le rapport hiérarchique diffère. La hiérarchie change également en fonction de la motivation. Par exemple, si le chien A est d’habitude prioritaire pour manger, mais qu’il est rassasié, il est alors possible qu’il laisse le chien B manger. On ne peut pas en conclure que le chien A ou B est alors « dominant», car tout dépend du contexte. Si on observe une meute de chiens errants, la cohabitation est paisible. Les liens sociaux sont positifs, et l’agression n’est qu’exceptionnelle. D’accord. Et qu’en est-il des relations entre chiens et humains ? Biologiquement, il n’existe pas de hiérarchie entre différentes espèces - donc pas de hiérarchie entre l’homme et le chien. On vient de prouver qu’il n’existe pas de hiérarchie entre chiens, alors c’est encore moins le cas entre un chien et un membre d’une espèce différente. Certes, en tant que maître, je guide mon chien. C’est moi qui ai les clefs, puisque c’est moi qui donne les croquettes, par exemple. Le chien dépend déjà entièrement de moi. En principe, sans son maître il est perdu et ne peut rien faire. Donc, j’ai déjà un rôle clef dans sa vie, sans avoir à instaurer de hiérarchie.Tout ce qui suit consiste à apprendre au chien que coopérer avec son maître lui apporte quelque chose de positif. Il s’agit de l’encadrer de manière bienveillante pour qu’il ne reproduise plus les comportements qu’on ne souhaite pas. Par exemple : avec un chiot, on range toute chose susceptible d’être volée et on lui laisse plein de jouets. Quand il prend un jouet, on le félicite. Vous verrez que plus tard, si par mégarde vous laissez traîner votre chaussure, il sera plus probable que votre chien la laisse et mâchouille son jouet à la place.Si au contraire, vous laissez une chaussure traîner, puis vous réagissez négativement parce qu’il l’a mâchouillée, vous créez un conflit qui n’avait pas lieu d’être. Les maîtres s’étonnent alors que le chien montre les dents. En réalité, il se sent juste menacé parce qu’on lui prend sa chaussure en le grondant violemment. Les maîtres en tirent la conclusion qu’il est dominant. En réalité, la plupart des cas d’agression sont de l’autodéfense. Le chien se sent menacé. Il ne comprend pas pourquoi l’humain l’agresse. Résultat : il se défend et se rebiffe. Donc ce n’est pas un problème de hiérarchie. Alors conclusion : on a le droit de manger après son chien ou de le laisser monter sur le canapé ! Absolument ! Personnellement je ne préfère pas que mon chien aille sur le canapé, parce qu’il fait de longues balades très salissantes ! Mais si vous aimez que votre chien soit sur le canapé, il n’y a pas de problème ! Ça ne veut pas dire qu’il devient le chef à la maison.    

Claude Lefevre

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