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L’école du chiot : un bonheur pour certains, la torture pour d’autres

Publié le 31 Janvier 2020
  C’est un réflexe quasi-automatique quand on adopte un jeune chien : on l’inscrit à l’école du chiot. Les chiots qui montrent une appréhension envers leurs congénères y sont d’autant plus confrontés. Leurs humains, pensant bien faire, les emmène à l’école pour les « habituer » aux autres chiens. Oui, la sociabilisation du chiot est primordiale. Non, l’école du chiot n’est pas toujours la meilleure manière de procéder. Je vous explique pourquoi dans cette lettre. (Notez : tout ce que je dis ici vaut aussi pour le chien adulte peureux qu’on emmène dans un parc à chien bondé, dans l’espoir de le sociabiliser !) A l’école du chiot, Pénélope était « la bonne copine » Je vous parle de l’école du chiot en connaissance de cause, car j’y ai moi-même été avec Pénélope et Maki, que j’ai eu très jeunes. Pénélope était sans aucun doute « Mademoiselle Populaire ». C’est une chienne qui sait très bien communiquer. En quelques minutes, elle avait déjà un Beagle, un Berger Allemand, et un Jack Russel qui la suivaient dans toutes ses bêtises. Elle était ravie, chaque semaine, de retrouver ses amis, et passait l’heure à se pavaner, la queue haute, entourée de son petit ‘fan-club’. Maki, lui, était la tête de turque. J’ai adopté Maki quelques semaines après Pénélope. J’avais remarqué, lors de son arrivée chez moi, que ses premiers contacts avec les chiens étaient plutôt houleux. Maki était sur la défensive. « Un vrai caractère de cochon ! » m’étais-je dis. Je ne vous cache pas qu’à l’époque, mes connaissances en éducation canines étaient rudimentaires – voire inexistantes. J’ai donc décidé qu’il serait bon d’emmener Maki à l’école du chiot. Dès son arrivée, tous les chiots se sont rués sur lui. Normal : c’était le petit nouveau. Imaginez un peu la situation de mon pauvre Maki. Assailli par une meute qu’il considérait comme menaçante, il a d’abord essayé de fuir. Inutile : le terrain était clôturé, et certains chiens, plus âgés, couraient bien plus vite que lui. Il s’est donc recroquevillé contre un grillage. Des dizaines de chiens sont venus le renifler ; lui donner des petits coups de patte ; le lécher. Ce n’était pas méchant, bien entendu. Mais imaginez-vous retrouver enfermé dans un enclos avec une douzaine d’énormes araignées. Imaginez qu’elles s’approchent de vous et se baladent sur votre corps. On aura beau vous répéter « pas d’inquiétude, elles sont gentilles ! », vous seriez sans doute très, TRÈS mal à l’aise. Voilà la situation dans laquelle Maki se trouvait. Et Maki a eu une réaction qui, étant donné le contexte, était tout à fait normale : il s’est défendu. Il a grogné. Claqué des dents. Même mordu. Comme il s’agissait de chiots, cette petite « bagarre » n’avait rien d’impressionnant. Néanmoins, j’ai tenté de récupérer mon chien, et de le séparer avant que cela ne s’aggrave. L’éducateur m’a interdit de mettre un terme à la bagarre. « Il faut les laisser communiquer ! » m’a-t-il dit. Et moi, bêtement, je l’ai cru. N’ayant alors aucune expérience dans le domaine, je lui ai donné ma confiance aveugle. Résultat : Quelques mois plus tard, Maki présentait de sérieux problèmes comportementaux. Vous connaissez son histoire : Maki s’attaquait à tous les chiens qu’il croisait, petits ou grands, mâles et femelles, avenants ou timides. Pourtant, je l’avais « socialisé » à l’école du chiot dès son plus jeune âge. Où était l’erreur ? Laisser les chiots communiquer librement : oubliez tout ce qu’on vous a dit ! Je réalise maintenant que mon « comportementaliste » de l’époque n’était peut-être pas vraiment au point sur les bonnes pratiques de l’éducation canine. (Heureusement, je travaille avec quelqu’un d’autre depuis !) A présent, je reconnais mes erreurs. Je vous les partage, en espérant que vous ne tomberez pas dans le même panneau ! Habituellement, je suis un grand partisan de la communication ‘libre’. Oui, il est important de laisser les chiens se renifler ; jouer ; s’exprimer ; et même grogner quand on dépasse leurs limites. Cela vaut pour tous les chiens… à condition qu’ils sachent bien communiquer. Je vous cite ici un extrait du blog de Sara Garcia Galan¹, mon éducatrice canine. Elle nous donne ici l’exemple de son propre chien, Rex : « Il y a peu, je me trouvais dans un parc canin. Nous y avons rencontré un Berger Australien mâle du même âge que Rex. Ce chien était très bien codé, mais Rex ne pensait qu’à le chevaucher. Comme à mon habitude j’anticipais en demandant à Rex de laisser, ce qu’il fait assez facilement. Néanmoins, il y retournait quelques minutes plus tard. La maîtresse ne cessait de me répéter ‘Mais laissez-les faire, le mien va le remettre en place !’. Pendant tout ce temps, j’ai bien-sûr observé son chien et les autres autours. Je me suis vite rendu compte que son chien se faisait très souvent harceler par les autres, et montrait beaucoup de signaux de stress à l’approche de Rex ou d’autres chiens. Alors, doit-on vraiment laisser faire même si cela signifie que l’un des deux chiens sera extrêmement mal à l’aise et passera son temps à remettre en place un chien qui le harcèle ? Dans ma tête cela était très clair. Il était hors de question de mettre ce chien en stress en laissant le mien avoir un comportement inapproprié. J’ai alors entamé une discussion avec cette dame. Même si son Berger Australien ne se laisse pas faire, si je laisse Rex le chevaucher, il reproduirait ce comportement sur d’autres chiens, qui eux, n’arriveront peut-être pas à dire ‘stop’ correctement. Voilà pourquoi je ne veux pas que Rex ait l’occasion de produire ce comportement avec son chien non plus. Plus un comportement est produit, plus le chien le reproduira par la suite. En ne laissant pas un comportement apparaître, le chien fini par ne plus le produire du tout. Ne pas laisser un chien avoir un certain comportement avec d’autres chiens ne signifie absolument pas qu’on ne les laisse pas communiquer, mais simplement qu’on ne laisse pas son chien communiquer n’importe comment, avec toutes les conséquences que cela engendre. Son Berger Australien bien codé pourrait très rapidement devenir réactif à force de remettre en place des chiens qui le harcèlent sans succès. » Je suis tout à fait d’accord avec Sara. On peut laisser les chiens communiquer librement… à condition que les 2 chiens soient bien « codés ». Ce qui est rarement le cas des chiots. Normal : ils sont en plein apprentissage de la communication ! Une garderie où PERSONNE n’apprend à communiquer Voilà à quoi ressemble les écoles du chiot mal gérées. Jusqu’à leurs 1 an, les chiots apprennent encore à communiquer. Par exemple, un chiot ne comprend pas toujours la signification d’un grognement. Un chiot ne comprend pas que ses congénères n’aiment pas être mordillés – d’autant plus qu’il ne contrôle pas encore sa morsure. Un chiot ne saisit pas qu’un chien qui fuit a besoin d’être laissé tranquille. Imaginez maintenant mettre 12 chiots ensemble, en espérant qu’ils apprennent à communiquer, sans personne pour montrer l’exemple. Sans l’intervention d’humains, c’est l’anarchie ! On se retrouve ensuite dans la situation qu’a connu Maki : des chiots qui se mordent, aboient, se chevauchent… Sans aucune limite. Si personne ne les empêche, ces chiots vont prendre l’habitude de communiquer en chevauchant, mordillant, harcelant. Si personne ne défend ceux qui se font harceler, ils finissent par se défendre eux-mêmes, en mordant. Pour ceux-là, l’attaque devient leur première méthode de communication. Voilà pourquoi il faut faire très attention à l’école du chiot que vous choisissez. Dans une bonne école du chiot, l’éducateur ne laisse pas les chiens faire tout ce qu’ils veulent. Il vous laisse intervenir. Il apprend aux chiots à communiquer dans le respect de l’autre. Vous n’êtes pas toujours obligé d’intervenir pour que votre chiot apprenne à communiquer. Vous pouvez, en tant qu’humain, apprendre à votre chiot le respect de ses congénères. Mais il existe une technique encore plus efficace, amusante, et qui ne vous demandera aucun effort : Laissez votre chiot au contact d’un chien adulte et très bien codé. Je vais vous donner l’exemple de Pilat. Pilat est le chiot d’un collègue, et elle a la chance de venir régulièrement au bureau avec nous. Je lui ai proposé d’emmener Pénélope au travail également, afin de socialiser Pilat. Je précise que Pénélope est un chien extrêmement bien codé (c’est primordial). Pénélope communique très bien avec les autres chiens. Elle fait de formidables appels au jeu. Elle adore la compagnie de ses congénères. Mais s’ils dépassent ses limites, elle les remet en place de manière proportionnée. Avec Pénélope, Pilat apprend les bases de la communication à merveille. En quelques jours, elle a compris qu’il ne fallait pas mordiller ses congénères trop brusquement. Elle a compris qu’un chien qui lève les fesses en s’appuyant sur ses coudes a envie de jouer. Elle a compris qu’il ne fallait jamais voler les croquettes des autres chiens. Elle a compris que quand elle était fatiguée, il suffisait d’aller se coucher, et qu’on la laissait tranquille. Elle a compris qu’après un grognement, elle a intérêt à se tenir à carreau, sinon elle risque un coup de dents. Pilat a suivi l’exemple de Pénélope. Maintenant c’est une jeune chienne qui sait communiquer dans le respect de l’autre. Mettre votre chiot au contact de chiens adultes et équilibrés sera infiniment plus bénéfique qu’une école du chiot où tout le monde est libre de harceler à tout-va. J’espère que mes conseils vous ont été utiles. Si vous connaissez des personnes prêtes à adopter un chiot, n’hésitez pas à leur partager cet article.  

Claude Lefevre 

  ¹https://think-dog.com/2018/05/22/communication-et-harcelement/

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